mardi 28 avril 2009

L'imbroglio somalien

Le regard de la communauté internationale sur la Somalie vient de changer du tout au tout : ce pays, parmi les plus pauvres de la planète, et en plein chaos - une guerre civile le terrasse depuis 1991 - attire aujourd’hui l’attention de nos grands dirigeants du monde. Pourquoi ? parce que des pirates somaliens prennent en otages des navires commerciaux et réclament des rançons pharamineuses. Des cargos, supertankers, navire marchands, voiliers, thoniers français, japonais, ukrainiens, libanais ou russes ont été attaqués dans le golfe d’Aden, passage privilégié du commerce maritime international par lequel transite 30% du pétrole mondial. Selon l'Organisation maritime internationale (OMI), plus de 120 actes de piraterie ont eu lieu au large des côtes somalienne en 2008.


Non pas que le problème du piratage n’en soit pas un. Il est du devoir de nos dirigeants de protéger les navires qui battent leur pavillon et le personnel qui leur est attaché, au pire en mettant un frein, au mieux un coup d’arrêt aux actes de piraterie dans les eaux territoriales somaliennes. Mais ce qui me gêne dans cette démarche, c’est qu’il a fallu attendre que le commerce international soit menacé, que les intérêts financiers des entreprises ou des ressortissants des pays les plus riches de la planète soient mis en danger, pour qu’enfin la communauté internationale, dixit Ban ki Moon, secrétaire général de l’ONU, décide de « s’attaquer aux causes profondes de la piraterie sur le territoire somalien ». Et ce qui me gêne encore plus, c’est que, à ces causes profondes, on oublie bien évidemment de parler de la surpêche illégale pratiquée par des navires européens et asiatiques dans les eaux somaliennes et du rejet de déchets toxiques, voire nucléaires (!), déversés au large des eaux somaliennes, depuis l'effondrement de l'Etat en 2001.

Un article très intéressant de Johann Hari publié par le Huffington post (traduit et édité sur le site contreinfo.info) émet la thèse que des pêcheurs somaliens, soucieux de protéger leurs ressources maritimes du pillage par des chalutiers étrangers, se sont transformés en pirates, prenant ainsi le relais des gardes-côtes inexistants depuis la chute du régime. C'est en tout cas l'argumentaire brandi par les pirates. Lors d'une interview accordée au New York Times, Sugule Ali, pirate somalien, se justifiait ainsi : "Nous ne nous considérons pas comme des bandits. Les bandits des mers sont ceux qui pêchent illégalement dans nos eaux et ceux qui jettent des détritus polluants. Alors pensez à nous en tant que gardes-côtes qui patrouillent la région".

Depuis des années, certaines organisations internationales comme l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), l'ONU, et l'OCDE tirent la sonnette d'alarme au sujet des "braconniers" des mers qui contournent les quotas nationaux en pêchant dans des zones poissonneuses peu fliquées. Au total, selon la FAO, les pêcheurs somaliens auraient perdu plus de 300 millions de dollars de revenus liés à la pêche, la principale ressource d'un des pays les plus pauvres du monde. Un premier rapport de l’ONU en 2006 dénonçait ces pratiques illégales et immorales et de nombreuses résolutions, jamais vraiment appliquées, ont interdit aux bateaux de pêches de s'adonner à leur activité en dehors de leur propre zone. D'autre part, en décembre 2004, la Somalie a été durement touchée par le Tsunami, qui coûta la vie à plus de 300 personnes et eut un impact économique et écologique dévastateur. En outre, le Tsunami déposa sur les plages somaliennes quantité de déchets toxiques, largués en mer en toute impunité par des entreprises occidentales ne voulant pas supporter le coût exorbitant de leur enfouissement ou de leurs retraitement. Le Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE) a rendu un rapport inquiétant en mars 2005 : des maladies nouvelles ont fait leur apparition parmi la population locale dont les symptôme font curieusement penser à une contamination chimique ou radioactive. Ainsi, les cancers et les cas de stérilité, entre autres, se sont multipliés. Des propos de l’émissaire de l’ONU en Somalie, Ahmedou Ould Abdallah, recueillis par l'agence de presse Reuters confirment cette version. Pourtant, la convention internationale de Bamako interdit depuis le 31 janvier 1991 toute importation de déchets toxiques en Afrique. L'anarchie ambiante permet aux pollueurs occidentaux, en soudoyant certains chefs de guerre, de continuer leurs petits trafics, sans crainte d'être punis.

Au début du mois d'octobre 2008, le Conseil de sécurité de l'ONU a adopté une nouvelle résolution - d'autres de la même teneur la précédaient - invitant les États ayant des navires croisant au large de la Somalie à s'investir pour en finir avec la piraterie. Ces derniers temps, de nombreux navires de guerre (OTAN, Russie, Navy américaine) assurent la sécurité dans le golfe d'Aden (sans toutefois arriver à éviter les actes de pirateries). Pourquoi l'ONU, qui dispose désormais d'une armada de navires de guerre envoyés pour protéger le commerce maritime, n'en profite-t-elle pas pour emmettre une nouvelle résolution qui protègerait par la même occasion les eaux somaliennes de la pêche illégale et du déversement des déchets toxiques et radioactifs ? Sans doute parce qu'elle ne peut pas forcer une patrouille internationale à faire de l'humanitaire, à protéger des intérêts autres que les siens, qui plus est, ne sont pas d'ordre économique...

Certes, le pirate somalien actuel n'est plus un simple garde-côtes. Il est un véritable bandit armé comme un guerrier, coupable de kinadpping et d'extorsion de fonds. Les revenus liés à cette nouvelle activité, devenue extrêmement lucrative, dépasse l'entendement du simple pêcheur qui tirait de la pêche de maigres revenus de subsistance, d'où sa popularité. L'éradication du piratage dans cette zone de l'Afrique de l'Ouest, et partout ailleurs, est une nécessité. Cependant, elle ne doit pas empêcher de mettre les pays européens et asiatiques devant leurs responsabilités. Et elles sont immenses. Ils doivent être traduit en justice pour avoir pendant des dizaines d'années mis en danger les populations africaines au mépris des lois internationales, des lois humaines et celles du bon sens. Jusqu'à preuve du contraire, l'Afrique n'est pas la poubelle de l'Europe. Enfin, peut-être serait-il temps de faire respecter cettte évidence.

L’UMP condamnée pour piratage !

Ce n’est pas une blague de « bon » goût, c’est le comble de l'absurdité. L’UMP, fer de lance de la lutte contre le piratage avec la loi Création et Internet, dite Hadopi, devra payer au groupe de rock américain MGMT, après règlement à l’amiable, 30 000 euros de dommages et intérêts ! Le délit ? L’utilisation du morceau Kids sans autorisation du groupe lors de la Convention nationale de l’UMP, en janvier dernier. Comment appelle-t-on l’utilisation d’une musique sans acquittement des droits d’auteur ? Et c’est là que le bât blesse. Alors que nous nageons dans une polémique à couteaux tirés suscitée par une loi censée protéger les droits d’auteur, le parti majoritaire est surpris la main dans le sac mais en dehors du portefeuille. En matière de donneur de leçon, l’UMP a de sérieux progrès à faire...

lundi 20 avril 2009

Les tribulations d’Areva au Niger

Le 23 juin, Areva et Thierry d'Arbonneau, délégué par son groupe au Niger, comparaîtront devant la XVIIe Chambre du Tribunal correctionnel de Paris. Les plaignants sont les touaregs du Niger, une population habitant traditionnellement dans le nord du Niger où les mines d’uranium sont exploitées depuis les années 70. Areva n'est pas traduite en justice pour les conséquences désastreuses et irréversibles générées par l'exploitation, depuis plus de 40 ans, de l'uranium qui n'est rien d'autre qu'un minerai radioactif extrêmement dangereux pour l'homme et son environnement. AREVA ne répondra pas devant la justice pour la destruction des pâturages, la pollution radioactive de l'eau, de l'air - avec des conséquences néfastes sur la santé comme le cancer, la stérilité - des spoliations territoriales, des déplacements forcés sans indemnisation... Le motif de la plainte des touaregs, épaulés par une ONG allemande de défense des droits de l’Homme est la "provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence".

C'est au cours d'un colloque organisé le 21 octobre 2008 à Paris par le MEDEF, sur le thème "Garantir la sécurité économique", en présence de nombreux chefs d'entreprises, de Michèle ALLIOT-MARIE, ministre de l'Intérieur, que le groupe AREVA et son directeur de la Protection du Patrimoine et des Personnes, Thierry d'Arbonneau, ont invité publiquement le gouvernement français à donner aux autorités nigériennes les moyens militaires "de mater la rébellion des Touaregs". Des populations effectivement très gênantes quant on pense aux investissements que le groupe doit effectuer sur des terres encore habitées ! AREVA vient de remporter des contrats extrêmement juteux à l'étranger - grâce à Nicolas Sarkozy transformé en VRP de luxe pour le compte du groupe -; il lui faut donc augmenter sa production, et ce dans les meilleurs délais. Depuis des années, AREVA négociait avec le Niger le permis d'exploiter un autre gisement très riche en uranium, Imouraren. Elle vient de mettre plus d'un milliard d'euros sur la table pour amadouer le président Mamadou Tandja, qui a pris un malin plaisir ces derniers temps à faire monter les enchères entre les différentes puissances étrangères qui lorgnaient sur ses gisements d'uranium. Le 5 janvier 2009, AREVA obtient enfin le précieux sésame pour ce qui constituera, selon le groupe, "le plus grand projet industriel minier jamais envisagé au Niger". Le pays se placera alors au deuxième rang mondial, avec une production de 5 000 tonnes d'uranium par an.

Tout commence dans les années 70. C'est l'histoire d'une entreprise française spécialisée dans l'énergie nucléaire qui prend un envol inespéré après le choc pétrolier de 1973. La France, économiquement sur les rotules, affirme que l'on ne l'y reprendra plus et décide de produire son électricité à partir du nucléaire, pour garantir son indépendance énergétique. Commence alors une quête à travers le monde de gisements d'uranium, combustible avec lequelle on fait tourner les réacteurs nucléaires. Au Niger, un des pays les plus pauvres du monde, un immense gisement est découvert au nord du pays sur un territoire qu'occupent les touaregs, des populations nomades ou semi-sédentaires, là depuis longtemps. AREVA obtient le feu vert des autorités nigériennes pour exploiter les richesses du sol. Aujourd'hui, deux filière d'AREVA, la Somaïr et la Cominak, exploitent les deux grands gisements du pays et fournissent un tiers des centrales d'EDF. Le Niger est le troisième producteur d'uranium au monde mais sa population est toujours parmi la plus pauvre de la planète. Et, sanitairement parlant, en danger. Force est de constater, un peu naïvement je dois dire, que notre indépendance énergétique se fait au détriment de la survie de la population locale. C'est là qu'intervient le MNJ (Mouvement des Nigériens pour la Justice). Cette milice de touaregs, qui mène une lutte armée contre le gouvernement de Niamey, réclame, entre autres, une plus juste répartition des richesses liées à l'exploitation de l'uranium. Et n'hésite pas à s'en prendre aux compagnies étrangères qui tirent leurs bénéfices de la richesse de leur terre avec la bénédiction du gouvernement, sans que les populations environnantes lésées reçoivent une partie du gâteau. Il faut savoir que le prix de l'uranium a été multiplié par dix depuis 2003 et que le PNB par habitant n'a guère augmenté. Rien n'est vraiment fait par AREVA pour limiter cette catastrophe humaine, écologique et sanitaire. Enfin, pas officiellement. Le discours bien rodé des pontes d'AREVA met l'accent sur le lourd investissement sur place en terme d'emploi et de formation pour que les nomades tirent eux aussi bénéfice des exploitations minières. Ce que nient les touaregs et explique en partie leur lutte. Ils réclament aussi davantage de démocratie, de justice "et que tous les citoyens puissent vivre dans un environnement viable, où les préalables d'un développement durable sont établis".

Les propos tenus par le représentant d'AREVA doivent bien embarrasser le gouvernement français qui s’efforce de diffuser une image qui fait rimer exploitation économique et développement du pays et de sa population. Même si officieusement il ne s'embarrasse guère de ces détails. Nos présidents français successifs ont serré la pogne et fait des affaires avec des hommes politiques coupables de violation des droits de l'homme. Aux côtés d'AREVA coûte que coûte, l'Etat français n'est pas prêt à laisser derrière lui les bénéfices tirés des liens privilégiés avec la "Françafrique". La France a besoin aujourd'hui comme hier des richesses minières que le continent africain recèle, et ce à n'importe quel prix. Et puis la colonisation reste un moment unique et privilégié, un bon souvenir quoi (!), de l'histoire française pour nos gouvernants et les grandes entreprises françaises : l'article IV de la loi du 23 février 2005 a bien tenté il y a peu d'inscrire "le rôle positif" de la colonisation française dans les manuels scolaires, et plus largement dans la mémoire collective. AREVA n'a donc pas de souci à se faire pour l'exploitation de ses gisements en Afrique. Aucun tribunal français ne viendra remettre cela en question. Quand bien même la multinationale serait condamnée pour provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence, qu'est ce qui changera concrètement pour le peuple nigérien ?!

mercredi 15 avril 2009

Quand l'absentéisme des députés revient sur le tapis de l'Hadopi !

Le cuisant revers subi par la majorité la semaine dernière sur la loi Hadopi a mis sérieusement en rogne le secrétaire d'Etat chargé des relations avec le Parlement, Roger Karouchi. Au lieu de se poser la - bonne - question de la mobilisation des députés derrière la - très controversée - loi Hadopi, dont certains députés UMP contestaient publiquement la viabilité et la pertinence, Roger Karouchi a brandi l'absentéisme des députés comme raison à cet échec humiliant. Banco ! Une autruche face au danger n'aurait pas fait autrement. Non pas que l'absentéisme des députés ne soit pas un problème à régler mais il apparaît comme un écran de fumée pour masquer le réel débat sur une loi que beaucoup jugent idiote.

En brandissant la menace d'une sanction financière à l'encontre des déserteurs de l'hémicycle, Karouchi a affolé le président du groupe UMP à l'Assemblée nationale, Jean-François Copé. Dans un entretien accordé au Figaro, Coppé affirme qu'une sanction financière pour les députés trop souvent absents lors des votes "ne doit rester qu'une mesure extrême". Or, il faut savoir qu'une telle loi existe déjà pour les députés coupables d'absences répétées et non justifiées - l'article 162 du règlement de l'Assemblée - mais elle n'est pas respectée. En bref, Karouchi menace donc de faire appliquer une loi existante largement ignorée et Copé de lui répondre que cela ne doit se faire qu'en dernier recours ! Bonjour la démocratie... Il est vrai, monsieur Copé, qu'une telle mesure serait totalement déplacée dans la mesure où le traitement mensuel actuel d'un parlementaire s'élève à plus de 5 200 euros net et que la sanction financière prévue en cas d'absentéisme impute d' un ou deux tiers son « indemnité de fonction », qui elle-même équivaut à environ un cinquième du traitement. Vous l'avez compris, la sanction financière serait de quelques centaines d'euros ! Mesquineries...

Et pendant ce temps, les pontes de l'UMP noient le poisson Hadopi dans l'eau de la contestation intra muros. Mais Jean-François Copé rassure : "les socialistes retrouveront le 28 avril une majorité UMP totalement mobilisée". Ouf ! Nous qui pensions que certains députés de la majorité avaient quitté l'hémicycle pour ne pas avoir à voter une loi dont ils ne voulaient pas...

mercredi 8 avril 2009

Photo de famille : cherchez l'anomalie


Mais où se cache donc cette anomalie ? Cette photo des couples présidentiels français et américain, a été prise le 3 avril durant le sommet de l'OTAN à Strasbourg et publié sur le site Internet du magazine allemand Der Spiegel.

Pour trouver l'anomalie, regardez au bas de la photo, au niveau des talonnettes de notre président. Eh oui, il est bien sur la pointe des pieds ! Il n'est pas vraiment de bon ton - cela va même à l'encontre de l'éthique du journaliste - de se moquer de l'apparence physique d'une personne puisque, dans l'absolu, elle n'y est pour rien et faire un procès à ses parents pour une tare physique qu'ils vous auraient léguée, relève de la pure fantaisie pré-pubère. Mais je n'ai pas pu résister à l'envie de vous faire partager ce pur moment de franche rigolade. Au delà de la petite taille de Nicolas Sarkozy, déjà moult fois raillée, ridiculisée et caricaturée, c'est de son ridicule dont je me moque.

Se mettre sur la pointe des pieds pour ne pas que les "quelques" centimètres qui vous séparent des trois autres géants de la photo vous décrédibilisent, c'est une chose. Tous ceux qui se plaignent de leur petite taille l'ont déjà tenté, au moins une fois. Mais intelligemment. Pas devant des photographes qui vous mitraillent, qui plus est de plein pied. Comment cet homme, expert es communication et es image, a pu ne pas évaluer le risque d'être pris sur le fait, la main dans le sac, le pied sur la pointe. Être de "taille plus petite" n'est pas une tare, peut-être juste un sujet de moquerie qui lasse et passe avec le temps - bien que chez les Guignols, la raillerie conserve toute sa fraicheur -. Mais se hisser sur ses pieds sur une photo officielle censée saluer le retour de la France dans le commandement de l'OTAN, autrement dit la grandeur de la France, aux côtés du président américain - grand par la taille et par l'importance - et se faire choper (!) est d'un grotesque sans borne. Voilà, maintenant ce bref moment de frustration d'un président qui a toujours rêvé de jouer dans la cour des grands, est immortalisé. Notre président de la République va bientôt devenir la risée du monde entier. Une fois de plus. Alors autant prendre le monde de court et se jeter dans "l'autodérision". Le Canard Enchaîné l'a fait, en Une de l'édition de ce matin.

Big Brother : ça va arriver près de chez vous !


[FR] HADOPI : Big Brother is coming to get you ! from yenda+germainpinpin on Vimeo.

1998. Le club Internet réalise un clip vidéo visionnaire sur l’autodafé d’Internet : « Ceux qui ont brulé les livres voudront peut-être bruler aussi l’Internet car nous en avons fait l’outil de la liberté et de la culture ».
2009. La vidéo est reprise pour dénoncer la loi Création et Internet dite Hadopi. Aux images cataclysmiques de la destruction des ordinateurs ont été ajoutés en sous-titrage les articles liberticides de l'Hadopi.
Pour tous ceux qui ont du mal à saisir les enjeux d'une telle loi aux multiples ramifications, cette vidéo d'une minute est une brillante synthèse.

lundi 6 avril 2009

"banquiers et traders : virez-les tous"

Un coup de gueule comme celui de l'économiste Michel Godet sur le plateau de C dans l'air sur France 5, fait du bien. Je dirais même fait un bien fou ! D'abord parce qu'il ne mâche pas ses mots : son discours a le mérite d'être franc et direct. Les banquiers et leurs traders ont fait gonfler de façon irresponsable la bulle financière virtuelle - 1 000 milliards de dollars - parce que cela leur permettait de mettre directement dans leur poche 10 % de cette somme - quant à elle bien réelle. Et ceci en toute légalité. Michel Godet dénonce leur cupidité qui, si il reste aux mêmes postes, les amènera de nouveau à se refaire une santé économique. "On ne garde pas les pédophiles à la tête d’une colonie de vacances. Pour les banquiers, c’est la même", assène-t-il en utilisant un raccourci certes grossier mais très parlant. Il faut faire "le nettoyage" à la tête des banques en diligentant des enquêtes sur les comptes pour dénicher ceux qui les ont inondés de créances pourries. Et virer les coupables.
Une fois lancé, on ne l'arrête plus. Les paradis fiscaux ne sont pas les seuls fautifs de la crise. Et pour cause : quid de l'inégalité de la concurrence fiscale ? Vous savez, ces pays qui offrent une fiscalité avantageuse à nos hommes d'affaires, nos sportifs et autres artistes. A ces français de nationalité mais au porte-feuille en exil qui échappent à leur devoir de citoyens en refusant de redistribuer une partie de leur richesse...
A écouter absolument jusqu'au bout.

TF1 prise en flagrant délit de mensonge

Un arrangement avec les faits mis en scène par la chaîne publique du groupe de Martin Bouygues – autre ami intime de notre président – a failli passé inaperçu. Mais c’est sans compter sur le site Arrêt sur images qui a révélé la supercherie. Cela se passe le jeudi 2 avril à l’Assemblée nationale, où un débat sur la loi Création et Internet, qui déchaîne les passions sur le Net, a mobilisé plus de 41 heures les députés. Vers 22h45, alors que l’hémicycle est quasiment désert, le secrétaire d’Etat Roger Karouchi décide qu’il faut passer immédiatement au vote de la loi. Certains députés protestent tant le vote d’une loi aussi controversée par si peu de députés est insensé. En vain. La loi est adoptée par une dizaine de députés. Une hérésie pour une démocratie. Or, pour illustrer le vote de la nouvelle loi - qui fait grincer pas mal de dents, il faut dire - TF1 dans un reportage diffusé dans le journal de 20 h du vendredi 3 avril, choisit des images d’une assemblée bien remplie (on se demande même où elle est allée les chercher tant l’assiduité des députés est sujet à caution…) Et hop ! Sauf que voilà, Internet est un formidable outil de communication, d’informations et donc de veille citoyenne. Et vlan, TF1 est prise la main dans le sac. Ce n’est pas la première, et vu les états de service déontologiques de la chaîne, ces pratiques ont de beaux jours devant elles. 

vendredi 3 avril 2009

Méfiez vous de la police !

Quel pays "tolère" de sa police les passages à tabac, les injures à caractère raciste et l’usage abusif de la force en classant sans suite, dans la majorité des cas, les plaintes déposées contre elle avant même qu'elles arrivent au tribunal ? Quel gouvernement ferme les yeux lorsque ses forces chargées du maintien de l'ordre recourent régulièrement à toutes formes de discrimination, utilisent abusivement l'outrage à agent et prennent toutes sortes de libertés avec les droits humains... Si je vous dit que ce pays n'est ni une dictature, ni une théocratie, ni une république bananière. Difficile ?! Un indice : ce pays est une démocratie occidentale, qui depuis le XVIIIe siècle, est le symbole des droits de l'Homme, du moins se définit-il comme tel. Vous n'y êtes toujours pas ? Liberté, égalité, fraternité ? C'est bien de la France dont il s'agit... Aussi surprenant que cela puisse paraître.

L'impunité de la police française est dans la ligne de mire du rapport à charge qu'a publié le 2 avril Amnesty international. Intitulé France. Des policiers au-dessus des lois, ce rapport constate de manière accablante de nombreuses violations flagrantes des droits humains – souvent contre des minorités ethniques – pour lesquelles ils sont rarement traduits en justice. L'ONG avait déjà, dans un rapport paru en 2005, rendu compte de cette inacceptable impunité. La France a même été condamnée par la Cour Européenne des Droits de l'Homme - quelle honte quand même, vous y pensez ! - suite à l'affaire Pascal Taïs. Souvenez-vous, ce jeune franco-marocain de 33 ans décédé dans une cellule de dégrisement dans un commissariat à Arcachon (Gironde). Cette affaire jugée plusieurs fois en France, entre 1996 et 2003, avait aboutie à plusieurs non-lieux. En 2006, la Cour européenne a estimé que la France avait violé l’article 2 (droit à la vie) de la Convention européenne des droits de l’homme en ce qui concerne ce décès mais également en raison de "l’absence d’enquête effective menée sur les circonstances l'ayant entouré". Une enquête bâclée, des témoignages passés à la trappe, des contradictions sérieuses, le tout soutenu par le gouvernement français de l'époque. Dans son arrêt, la justice européenne a également demandé à la France qu'elle donne à ses fonctionnaires de police des instructions précises sur l'utilisation des méthodes de contrôle. Autrement dit, qu'elle exige de ses policiers qu'ils y aillent mollo. Le passage à tabac n'est pas digne d'une république qui a signé toutes les conventions existantes relatives au respect des droits de l'homme. Cela va sans dire, mais cela va mieux en le disant. Et il faut apparemment encore le répéter.

Et le répéter encore et encore. La preuve : la situation par rapport à 2005 se serait même dégradée selon David Diaz-Jogeix, directeur adjoint du département Europe d'Amnesty. A qui la faute ? Les fonctionnaires de police ont une part de responsabilité énorme dans ce type de comportement. Ils sont les garants de notre sécurité et du respect de nos droits et de nos libertés. Mais ceux sont aussi des hommes, ou des femmes, qui évoluent dans un climat de stress permanent et sont confrontés chaque jour à l'agressivité, voire même au danger devant lequel leurs devoirs les placent. La haine de l'autre surgit lorsqu'il met l'individu en danger et porte atteinte à son intégrité. Et de la haine à la violence, il n'y a qu'un pas, facile à franchir. Si, en plus l'impunité leur est accordée, le faux pas est tout proche, inévitablement. Impunité. Le mot est lâché. C'est un uppercut direct qui vise le gouvernement. Voyez l'attitude de MAM, notre ministre de l'Intérieur, qui court aussi vite qu'elle peut sur les lieux du "crime" dès qu'une bavure est annoncée, pour défendre devant les caméras l'innocence de ses fonctionnaires, avant même qu'une enquête ait été ordonnée. Irresponsable attitude qui contribue largement à la décrédibilisation de la police et constitue un blanc-seing pour les policiers peu versés dans la retenue. Affaire classée. D'après les informations limitées qu'Amnesty International a pu obtenir, sur 663 plaintes examinées par l'organe d'inspection de la police en 2005, seulement 16 ont conduit à la radiation des agents concernés. En 2006, seules huit allégations de violence sur 639 ont abouti à une telle sanction ! On reconnaît un type de régime à sa police.

jeudi 2 avril 2009

" Permis de violer "

En Afghanistan, un homme peut désormais "légalement" violer sa femme. Fin mars, le président Hamid Karzaï aurait donné son feu vert pour l'adoption par l'assemblée afghane, la loya jirga, d'une loi interdisant à la femme chiite hazara - communauté représentant 20 % de la population afghane - de travailler, de sortir, ou d'aller chez le médecin sans la permission de son mari. Cette loi rétrograde et barbare l'oblige également à satisfaire les assauts sexuels de son époux. Dans les faits, ce sont des pratiques largement répandues depuis l'arrivée des talibans au pouvoir il y a plus de 25 ans. La "chute" de ces fondamentalistes religieux en 2001 a été saluée par la communauté internationale comme une avancée pour les droits de l'Homme, mais surtout pour les droits de la femme. Or, le gouvernement pro-occidental de Karzaï n'a rien changé à l'effroyable condition des femmes. Elles n'ont toujours ni droit ni dignité, et ce sont toujours leurs silhouettes-fantômes drapées de bleue qui arpentent les rues du pays, quand elles y sont autorisées.

Les droits de la femmes afghane ne valent donc pas tripette. Pourtant, l'Afghanistan est le premier pays musulman à avoir ratifié la Convention pour l'élimination de toute forme de discrimination contre les femmes. Et la nouvelle constitution afghane, votée en 2004, proclame l'égalité des sexes. Or, la constitution précise aussi que le droit coutumier l'emporte sur le droit constitutionnel ! Autrement dit, puisque c'est la coutume, les femmes restent subordonnées à l'homme et à ses désirs, sans jouïr d'aucun droit, comme avant. Selon un rapport de l'ONU sur le développement humain en Afghanistan de 2007, l'espérance de vie d'une femme est de 42 ans, 60 à 80 % des mariages sont des unions forcées ou précoces, et la violence exercée quotidiennement envers les femmes "atteint des proportions épidémiques". Selon la Commission afghane indépendante des droits de la personne, le désespoir des femmes subissant ces violences a amené plus de 180 d'entre elles à s'immoler par le feu et plus de 200 à se suicider.

Que font l'ONU, l'OTAN, les Etats-Unis - cet éternel combattant pour la liberté et la démocratie (!) - et l'Union européenne pendant que le fondamentalisme religieux regagne du terrain ? Comment une loi si méprisante et humiliante pour la femme, peut-elle être votée sept ans après l'entrée en guerre des forces internationales coalisées contre le terrorisme et l'obscurantisme. A quoi cela aura-t-il servi d'avoir renversé un modèle de société, aussi imparfait soit-il, si celui que les armées occidentales contribuent à bâtir chaque jour aux côtés des Afghans bafoue, nie, ou est incapable de protéger les droits les plus élémentaires de l'individu. La guerre en Afghanistan nous a été vendue comme le combat contre la barbarie des Talibans. Un combat que 7 années de guerre, 70 000 soldats et des milliards investis n'ont pas réussi à remporter... Les Talibans ne sont plus au pouvoir mais la relève a été assurée.