vendredi 3 avril 2009

Méfiez vous de la police !

Quel pays "tolère" de sa police les passages à tabac, les injures à caractère raciste et l’usage abusif de la force en classant sans suite, dans la majorité des cas, les plaintes déposées contre elle avant même qu'elles arrivent au tribunal ? Quel gouvernement ferme les yeux lorsque ses forces chargées du maintien de l'ordre recourent régulièrement à toutes formes de discrimination, utilisent abusivement l'outrage à agent et prennent toutes sortes de libertés avec les droits humains... Si je vous dit que ce pays n'est ni une dictature, ni une théocratie, ni une république bananière. Difficile ?! Un indice : ce pays est une démocratie occidentale, qui depuis le XVIIIe siècle, est le symbole des droits de l'Homme, du moins se définit-il comme tel. Vous n'y êtes toujours pas ? Liberté, égalité, fraternité ? C'est bien de la France dont il s'agit... Aussi surprenant que cela puisse paraître.

L'impunité de la police française est dans la ligne de mire du rapport à charge qu'a publié le 2 avril Amnesty international. Intitulé France. Des policiers au-dessus des lois, ce rapport constate de manière accablante de nombreuses violations flagrantes des droits humains – souvent contre des minorités ethniques – pour lesquelles ils sont rarement traduits en justice. L'ONG avait déjà, dans un rapport paru en 2005, rendu compte de cette inacceptable impunité. La France a même été condamnée par la Cour Européenne des Droits de l'Homme - quelle honte quand même, vous y pensez ! - suite à l'affaire Pascal Taïs. Souvenez-vous, ce jeune franco-marocain de 33 ans décédé dans une cellule de dégrisement dans un commissariat à Arcachon (Gironde). Cette affaire jugée plusieurs fois en France, entre 1996 et 2003, avait aboutie à plusieurs non-lieux. En 2006, la Cour européenne a estimé que la France avait violé l’article 2 (droit à la vie) de la Convention européenne des droits de l’homme en ce qui concerne ce décès mais également en raison de "l’absence d’enquête effective menée sur les circonstances l'ayant entouré". Une enquête bâclée, des témoignages passés à la trappe, des contradictions sérieuses, le tout soutenu par le gouvernement français de l'époque. Dans son arrêt, la justice européenne a également demandé à la France qu'elle donne à ses fonctionnaires de police des instructions précises sur l'utilisation des méthodes de contrôle. Autrement dit, qu'elle exige de ses policiers qu'ils y aillent mollo. Le passage à tabac n'est pas digne d'une république qui a signé toutes les conventions existantes relatives au respect des droits de l'homme. Cela va sans dire, mais cela va mieux en le disant. Et il faut apparemment encore le répéter.

Et le répéter encore et encore. La preuve : la situation par rapport à 2005 se serait même dégradée selon David Diaz-Jogeix, directeur adjoint du département Europe d'Amnesty. A qui la faute ? Les fonctionnaires de police ont une part de responsabilité énorme dans ce type de comportement. Ils sont les garants de notre sécurité et du respect de nos droits et de nos libertés. Mais ceux sont aussi des hommes, ou des femmes, qui évoluent dans un climat de stress permanent et sont confrontés chaque jour à l'agressivité, voire même au danger devant lequel leurs devoirs les placent. La haine de l'autre surgit lorsqu'il met l'individu en danger et porte atteinte à son intégrité. Et de la haine à la violence, il n'y a qu'un pas, facile à franchir. Si, en plus l'impunité leur est accordée, le faux pas est tout proche, inévitablement. Impunité. Le mot est lâché. C'est un uppercut direct qui vise le gouvernement. Voyez l'attitude de MAM, notre ministre de l'Intérieur, qui court aussi vite qu'elle peut sur les lieux du "crime" dès qu'une bavure est annoncée, pour défendre devant les caméras l'innocence de ses fonctionnaires, avant même qu'une enquête ait été ordonnée. Irresponsable attitude qui contribue largement à la décrédibilisation de la police et constitue un blanc-seing pour les policiers peu versés dans la retenue. Affaire classée. D'après les informations limitées qu'Amnesty International a pu obtenir, sur 663 plaintes examinées par l'organe d'inspection de la police en 2005, seulement 16 ont conduit à la radiation des agents concernés. En 2006, seules huit allégations de violence sur 639 ont abouti à une telle sanction ! On reconnaît un type de régime à sa police.

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